Ce soir je clos (presque) officiellement la thématique de la place de la femme dans les oeuvres de fictions. Il était non négociable pour moi de terminer cette thématique sur le Female Gaze et Iris Brey. La semaine dernière, je vous ai partagé la première partie de mon article sur ce sujet (si vous voulez le relire ou que vous l’avez raté, le voila). On avait découvert la définition qu’Iris Brey a donné au Female Gaze et celle que Laura Mulvey a donné au Male Gaze. On a aussi comparé ces deux regards en zoomant sur la scène de James Bond avec Halle Berry qui sort de l’eau. L’article se terminait par les idées reçues du Female Gaze que j’ai prit plaisir à déconstruire.
Aujourd’hui, on continu de découvrir les résultats des recherches d’Iris Brey. On va découvrir les différentes techniques du Female Gaze et le test ultime.
Bonne lecture !
La voix-off un procédé du Female Gaze
La voix-off est un procédé très utilisé dans les fictions Female Gaze. Elle nous place dans la tête du personnage principal. Ce procédé permet de suivre les pensées du personnages. Comme on l’a vu dans la partie 1, le Female Gaze c’est une façon de filmer qui relève du sensible. C’est être avec le personnage. La voix-off est une technique qui permet cela. C’est pourquoi elle est souvent utilisée.
Dans Crazy ex-grirlfriend, le personnage de Rebecca Bunch part systématiquement dans ces pensées en chanson. Cette voix-off est le générique de sa vie (un petit exemple ici). Grâce à elle, on est avec Rebecca, et on rit.
La caméra dans un film Female Gaze
L’utilisation de la caméra peut aussi relever du Female Gaze. La caméra peut soit être porteuse de sentiments, soit être dans l’action. Elle est porteuse de sentiments quand, par exemple, elle est si proche du visage de l’acteur-ice qu’on a presque la sensation que l’écran de cinéma devient une seconde peau. Elle est dans l’action quand, par exemple, elle est tenue à l’épaule et suit le mouvement des corps.
Les plans traduisent aussi le Female Gaze. Quand il est fixe, c’est généralement du Male Gaze. C’est souvent le cas quand l’actrice est passive dans une scène de sexe. Pas de mouvements = pas besoin de bouger la caméra. Ces scènes ne servent en règles générales pas de propos et ne racontent rien. Pour que la scène relève du Female Gaze, la camera doit simplement évoluer avec les corps, pas les regarder.
Dans son film Titanic, James Cameron dévoile une scène de sexe hyper érotique, bien que très épurée. Quand, sur la vite embuée on ne voit que la main de Rose, on comprend qu’elle a prit beaucoup de plaisir. On imagine qu’elle a eu un orgasme, sans qu’elle ne soit jamais objectifié. Cette façon inattendue et novatrice de filmer le sexe donne un rendu très érotique. C’est totalement du Female Gaze.
Dans ce film, on peut aussi s’arrêter sur la scène du dessin. Rose se met nue et demande à être dessinée. Elle n’est pas objectifiée dans cette scène, mais bien à l’initiative.
Le montage dans une fiction Female Gaze
Le montage est également un moyen de mettre en scène les émotions. Dans les fictions Female Gaze, le montage ne cherche pas forcément à être efficace en terme de rythme mais est pensé pour servir les émotions.
Par exemple, dans la série The Deuce, un des personnages est réalisatrice de films pornographiques. Dans l’épisode 1 de la saison 2 (timecode 12:53) elle propose à des réalisateurs un montage alterné entre des images pornographiques et des images « hors sujets » (un ventilateur, du jus d’orange…). On comprend alors qu’on est dans le corps de la femme qui va avoir un orgasme. Le montage offre une nouvelle façon de mettre en scène un orgasme féminin. On ne le voit pas mais on le ressent. Je trouve que c’est un exemple hyper percutant du Female Gaze.
Le test du Female Gaze
Contrairement au test de Bechdel, d’une redoutable efficacité pour révéler le manque de représentations féminines dans les fictions, le test du Female Gaze est là pour déceler si une oeuvre fictionnelle remet ou non en question de l’ordre patriarcal. Iris Brey a donc concocté un test en 6 points, que voici.
1 – le personnage principal s’identifie en tant que femme
2 – l’histoire doit être racontée de son point de vue
3 – son histoire remet en question l’ordre patriarcal (par exemple le personnage ne se marie pas, n’a pas d’enfants, ne se met pas en couple…)
4 – grâce à la mise en scène le spectateur ou la spectatrice ressent l’expérience féminine
5 – si les corps sont érotisés, le geste doit être conscientisé (les scènes de sexes ne doivent pas être gratuites mais servir l’histoire)
6 – le plaisir des spectateurs ou spectatrices ne découle pas d’une pulsion *scopique (*prendre du plaisir en regardant une personne en l’objectifiant, comme un voyeur).
J’ai besoin de vous !
Le Female Gaze est donc un nouveau moyen de raconter une histoire. Une vision sensuelle et sensitive d’une histoire. C’est ressentir avec l’héroine, être à la fois dans sa tête et dans son corps. Comme dit Iris Brey, le Male Gaze c’est regarder l’héroïne danser quand le Female Gaze c’est danser avec l’héroïne.
Si vous avez lu tous les articles de cet thématique, déjà je souhaitais vous adresser un GRAND merci ! Je suis ravie qu’ils vous aient intéressé autant que j’ai aimé faire mes recherches, les illustrer et les rédiger.
Bientôt, j’aimerai beaucoup écrire un article en prenant en compte VOS recommandations. Je souhaiterais dresser une liste des 10 films et séries féministes, inclusives et du registre du Female Gaze ! N’hésitez pas à m’envoyer un petit message sur Instagram pour me donner vos références.
Bon dimanche !
Ecrit et illustré par @chanelmentie
Sources : Les couilles sur la table #56 / Les couilles sur la table #57 / TEDxChampsElysées / RoadToCinema / Youtube RoadToCinema
Pour aller plus loin, tu peux écouter l’épisode de Balance ta pépite qui parle des femmes dans l’industrie des séries. Je partage mon micro avec mon experte sur l’épisode Pauline Mallet !
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